Passer au contenu

/ Département des littératures de langue française

Je donne

Rechercher

Navigation secondaire

Jean-Simon DesRochers, coscénariste du film Ville-Marie

Professeur au Département des littératures de langue française depuis 2014, Jean-Simon DesRochers est aussi un écrivain dont la carrière a connu des débuts remarqués : il recevait en 2003 le prix Émile-Nelligan pour son recueil de poésie Parle seul et il a été encensé par la critique pour ses romans, dont La canicule des pauvres en 2009. Il ajoutait récemment une troisième corde à son arc d'écrivain : la scénarisation du film Ville-Marie avec le réalisateur Guy Édoin.

 

 

Vous voici donc lancé une troisième fois avec votre premier scénario...

En effet, c'est assez rare de pouvoir être «nouveau» autant de fois! En fait, la scénarisation est partie de La canicule des pauvres. La maison de production Max Films a rapidement acheté les droits d'adaptation et c'est Guy Édoin qui a hérité de ce dossier. On s'est rencontrés, et ce fut vraiment un «coup d'amitié». Il m'a parlé d'un projet qui était dans ses tiroirs et j'ai commencé à y intervenir de façon critique. Il a fini par me lancer tout simplement : «Ça te tente de l'écrire avec moi, le scénario de Ville-Marie?» Et j'ai répondu «Ok».

Qu'allait chercher Guy Édoin en vous recrutant pour la coscénarisation?

C'est difficile de répondre à cette question sans avoir l'air d'un monstre de prétention. Mais, d'un point de vue pragmatique, probablement une plus grande définition des personnages, et aussi une façon de jongler avec plusieurs récits et d'entremêler tout ça.

Le scénario de Ville-Marie fait beaucoup parler de lui...

Visiblement, le scénario a été remarqué. C'est un peu une surprise, je m'attendais plutôt à l'anonymat complet. C'est peut-être parce que Monica Bellucci a répété aux médias que c'est à la lecture du scénario qu'elle a accepté le rôle, de façon quasi immédiate...

Écrire un scénario, c'est différent que d'écrire un roman ou de la poésie?

La différence est énorme, et c'est très stimulant. Avec la littérature, je suis pratiquement le seul maître à bord. Avec le cinéma, le scénario n'est pas l'œuvre. C'est le film qui est l'œuvre. Un bon scénario, c'est donc un texte qui a la capacité de susciter une interprétation, mais pas seulement de la part des comédiens. Toute l'équipe doit être stimulée à la lecture du scénario pour y aller à fond.

Comment avez-vous réagi à la première du film?

C'était la première fois de ma vie qu'un texte dans lequel je m'étais investi était reçu par environ 1000 personnes en même temps. Les entendre réagir au moment où l'on espérait qu'elles réagissent, les entendre rire à la milliseconde où on l'avait souhaité, c'est grisant.

Quelles sont les suites de ce projet de scénarisation?

La scénarisation de La canicule des pauvres va de l'avant avec Guy Édoin. Comme j'ai maintenant l'expérience et que j'ai suffisamment oublié mon roman, je peux l'interpréter de façon beaucoup plus libre. Je ne le «porte» plus en moi.

Pour ceux qui n'ont pas encore vu Ville-Marie, que leur diriez-vous?

C'est un film sur l'empathie, essentiellement. Je conseille surtout aux spectateurs de se laisser porter par les émotions que suggère le film, de ne pas chercher à comprendre tous les liens immédiatement. Les réponses nécessaires vont arriver à point nommé.

Bande-annonce du film Ville-Marie

 

Une presse élogieuse pour le film Ville-Marie


Jean-Simon DesRochers,  professeur et créateur

Comment décririez-vous votre domaine de recherche?

J'établis des liens entre les théories de la création et les neurosciences, les théories de l'évolution, la philosophie de l'esprit.

Pourquoi ajouter la recherche et l'enseignement à votre carrière d'écrivain?

Parce que je suis un affamé de tout! La création littéraire est un extraordinaire point de synthèse. Je peux donner un sens à n'importe quel type d'information ou de témoignage. Je peux aussi intégrer une somme de connaissances en les distillant dans un récit. La recherche et l'enseignement me permettent d'ouvrir mon imaginaire et de le partager.

Parlez-nous de la cohabitation de la création et de la recherche à l'Université.

La création littéraire est désormais officiellement reconnue, mais c'est la diversité au sein d'un département qui le rend intéressant. Nous avons besoin de chercheurs qui sont des éclaireurs de textes et qui découvrent des choses incroyables dans chaque siècle de l'histoire littéraire. L'écrivain, lui, est un lecteur dont le résultat de la recherche s'incarnera principalement dans une œuvre. Créer une œuvre, c'est assumer une très grande subjectivité dans l'exercice d'une lecture des textes.

Qu'aimez-vous de l'enseignement?

Le fait de passer de receveur à donneur. Orienter des étudiants qui savent plus ou moins comment s'y prendre avec leur projet d'écriture, mais qui savent qu'ils doivent écrire. Ou encore de voir soudainement un visage s'animer dans un cours de baccalauréat. Ça, c'est le salaire réel. La perspective de ne pas enseigner après mon doctorat me donnait vraiment les bleus.

Et la perspective de ne pas écrire?

Il faudrait que je sois dans le coma pour ne pas écrire. C'est dans ma nature. De toute façon, ma femme me le dit : «Quand tu n'écris pas, t'es pas endurable!»

Propos recueillis par Marilou Garon